Livre Blanc : Favoriser la parité en entreprise

Notre dernière étude, en partenariat avec le BCG, révélait que les leaders de la tech de demain n’étaient (malheureusement) pas de bons élèves en termes de mixité. Effectivement, seuls 22% des postes dirigeants des entreprises du FrenchTech120 sont occupés par des femmes. Alors face à ce constat, nous avons voulu passer à l’action. Comment ? En interrogeant celles et ceux qui, dans les chiffres, ressortent comme les meilleur·e·s en matière de parité. L’objectif ? Partager leurs bonnes pratiques pour permettre à d’autres structures de se lancer sur le chemin de l’inclusivité. On regarde tout cela de plus près ?

Ces bonnes pratiques sont issues du livre blanc SISTA x Little Big Connection « 12 entreprises tech face au défi de la parité. Regards croisés et bonnes pratiques » disponible ici en version complète.

Bonne pratique n°1 : Être sincère

L’idée ? Être intimement convaincu·e de l’intérêt de viser la parité

Pourquoi ? Parce que si ce n’est que pour l’image et non par conviction, les actions peu poussées et les résultats en demi-teinte se feront invariablement taxer de “pink washing”. C’est d’ailleurs ce que souligne Roxane Varza, Directrice de Station F : “Je pense qu’il y a beaucoup de paroles, beaucoup trop même. Il y a beaucoup d’entreprises qui signent des chartes mais qui ne mettent pas d’actions en place. Il faut plutôt montrer par l’action, même quand elle est encore restreinte”.

Concrètement, comment le faire ? Commencez par vous poser quelques questions. Par exemple, pourquoi est-ce que je veux m’engager pour la parité ? Qu’est-ce qui m’anime derrière cela ? C’est ce que l’on a demandé à Karima Ben Abdelmalek, Présidente et CEO d’happn et voici ce qui en est ressorti : “La parité permet d’enrichir le débat ainsi que les points de vue. Pour moi, parité égale confiance, confiance égale croissance et donc performance”. Même son de cloche chez Agathe Tavernier, Head of Talent de Skello  “Je suis convaincue qu’une équipe paritaire c’est une équipe qui gagne. On a besoin de toutes les idées et elles ne peuvent venir que de profils multiples.

Bonne pratique n°2 : Considérer la parité comme un vrai projet à piloter avec des données chiffrées

L’idée ? Mesurer vos actions pour donner à ce sujet le même niveau d’importance que d’autres thématiques. Car sans chiffres, il est difficile d’observer le progrès.

Concrètement, comment le faire ? 

  • Démarrer par un audit peut être judicieux pour faire le point et définir certaines priorités. Sur ce point, chez Skello, une équipe est même chargée du projet : “Nous avons deux personnes qui gèrent cette mission. Nous avons procédé à un état des lieux en regardant la répartition par genre, par équipe, par âge, les statistiques sur le turnover, afin de voir s’il y avait un déséquilibre sur le recrutement ou les candidatures entrantes. Nous nous sommes demandé si ces résultats étaient liés au secteur, à nos offres de recrutement, si nos annonces étaient trop techniques, etc. Nous avons également tenté de définir à quel moment du processus de recrutement nous perdions le plus de femmes” explique Agathe Tavernier.

  • Après l’audit, place au plan d’action. Pour qu’il soit pertinent, il est important de fixer des objectifs quantitatifs et qualitatifs, des points de suivi, des KPI, des dates-clefs, une communication interne voire externe et, pour les plus ambitieux, un plan annuel. En ce sens, le Pacte Parité développé par la French Tech peut vous être utile : “en tant que signataire de ce pacte, Nous nous engageons à honorer des objectifs très concrets comme compter au moins 20 % de femmes au comité exécutif d’ici fin 2025 et 40 % d’ici 2028, ou former 100% de nos managers aux enjeux de diversité, équité et inclusion, et la lutte contre les discriminations et le harcèlement” souligne par exemple Nicolas Fritz, Chief People Officer chez Contentsquare.

Bonne pratique n°3 : Sensibiliser ses équipes

L’idée ? Diffuser la politique de parité le plus largement possible. C’est ce qui va participer à nourrir la culture de votre entreprise. 

Concrètement, comment le faire ? Plusieurs options s’offrent à vous :

  • Vous pouvez solliciter un organisme spécialisé sur le sujet afin de mettre en place des ateliers ou des conférences sur la diversité par exemple. C’est notamment ce qui a été initié chez Contentsquare et SkelloNous avons investi dans un programme de formation pour les managers sur le leadership inclusif, le recrutement inclusif et ce que cela veut dire d’être un·e allié·e de voix sous-représentées” raconte Nicolas Fritz. “Chez Skello, lors de notre dernier offsite qui réunit toute l’entreprise deux fois par an, nous avons proposé un atelier pratique à faire par groupe. Il portait sur les mécanismes d’inclusion et d’exclusion pour mieux comprendre quelles sont les étapes qui mènent à ces deux chemins opposés” témoigne Agathe Tavernier.

     

  • Une autre solution, qui a notamment été déployée chez Vestiaire Collective, consiste à donner la parole aux hommes aux positions élevées dans l’entreprise sur les sujets de parité. “Pour nos conférences sur les femmes dans la tech, j’ai fait en sorte que ce soient des membres masculins de notre comité de direction qui présentent afin qu’ils travaillent sur le sujet. En parallèle, cela permet à notre Chief Technical Officer de devenir plus visible sur le sujet de la parité, et cela favorise l’ouverture de débats et de questionnements” relate Dounia Wone, la Chief Impact Officer. Comme elle le précise, les speakers deviennent porte-parole de la parité tandis que l’audience observe que des personnes visibles deviennent acteurs du changement en s’exprimant publiquement sur ce thème.

Bonne pratique n°4 : Favoriser l’accès de certains postes aux femme

L’idée ? C’est un fait : les postes les plus techniques trouvent peu de candidates. Le but est donc d’inverser la tendance en élargissant le panel de candidat·es. Grâce à ces rôles-modèles de dirigeantes, un effet mécanique d’entraînement se produit : leur nomination à ces postes facilite la projection d’autres femmes à des niveaux de hiérarchie qu’elles n’auraient peut-être pas osé envisager.

Concrètement, comment le faire ? Engager une démarche de recrutement proactive pour identifier des profils féminins représente une solution efficace à ce problème. Pour cela :

  • Vous pouvez commencer en exigeant que toutes les shortlists comptent au moins une femme. C’est la stratégie employée du côté de Singulart : “Quand nous ouvrons un poste et que nous n’avons pas de mixité en candidatures entrantes, nous faisons proactivement de la chasse sur la catégorie qu’il nous manque. S’il n’y a pas au moins une femme ou un homme (selon ce qu’il faut compenser) dans la shortlist, je ne la regarde pas ou je demande la preuve que les précédentes étapes étaient diverses” précise Véra Kempf, la co-fondatrice.

  • Ensuite, n’hésitez pas à développer des partenariats avec des écoles et des organismes qui favorisent l’insertion des femmes en entreprise pour contrebalancer leur non représentation dans certains domaines, notamment la tech.

  • Enfin, dernier conseil partagé par les interrogé·es sur ce point : posez vous la question de la parité dès les premiers recrutements afin d’insuffler une bonne diversité de base dans votre structure. “Quand on embauche ses 20 premiers salariés, il est probable que quelques années plus tard, ces collaborateurs soient managers. Il faut donc s’assurer dès le commencement que les offres s’adressent aux hommes comme aux femmes. Chez Shine, sur nos plus hauts salaires, nous comptons bientôt quatre femmes dans le top 10 contre une seule au début. 43% de nos managers sont aujourd’hui des femmes, contre 33% initialement” relate Mathilde Callède, la Chief People Officer. 

Bonne pratique n°5 : Veiller à l’inclusivité dans les offres d’emploi et les parcours de recrutement

L’idée ? Parler au plus grand nombre possible pour augmenter le nombre de postulantes.

Concrètement, comment le faire ?

  • Pensez à utiliser l’écriture inclusive, à féminiser les métiers et à avoir recours à un vocabulaire adapté dans vos fiches de poste. “Nous évitons par exemple certains mots comme “héros” car les femmes ne se reconnaissent pas dans ces intitulés” nous explique Mathilde Callède quant au fonctionnement chez Shine. “Aussi, nous évitons les listes de compétences à rallonge dans nos descriptions pour s’attarder davantage sur les soft skills. En effet, les études s’accordent à dire que les femmes ne postulent que si elles cochent 80% des prérequis listés dans une fiche de poste, là où les hommes postulent dès 50%” précise-t-elle. “Pour faire face aux nombreux stéréotypes et clichés sur les métiers de l’informatique, nous avons beaucoup travaillé la représentation, l’image et l’histoire de notre structure” ajoute Chloé Hermary, fondatrice et directrice d’Ada Tech School.

  • Soyez également attentif·ve aux images : “Que ce soit sur notre page Welcome to the Jungle ou notre site carrière, nous nous assurons que tout soit représentatif de la diversité de Skello” mentionne Agathe Tavernier la Head of Talent.

  • Côté processus de recrutement veillez à ce que les candidat·e·s rencontrent au moins une femme au cours de leurs entretiens. “Grâce à ces exemples de femmes et d’hommes au sein de l’entreprise, la projection de chaque candidat dans son futur métier est facilitée, quel que soit son genre” met en avant Agathe. En effet, pour Dounia Wone de Vestiaire Collectivesi on postule et que l’on ne rencontre que des hommes, cela ne donne pas le sentiment d’être une entreprise inclusive”.

Bonne pratique n°6 : Soutenir les jeunes parents

L’idée ? Aider les parents à concilier vie privée et vie professionnelle. De cette manière, vous réduisez les conséquences négatives de la maternité sur la carrière des femmes. 

Concrètement, comment le faire ? 

  • Par exemple, en proposant le télétravail, en interdisant les réunions à des heures trop tardives et en mettant en place une crèche d’entreprise. Comme c’est le cas chez Batch : “Nous développons une politique arrangeante sur la parentalité. A la direction, on est plus de la moitié avec des enfants de moins de 5 ans. Nous avons une crèche d’entreprise qui représente pour Batch 15000 euros par berceau et par an. C’est un investissement que l’on fait pour favoriser la parentalité et parce que ça nous semble important pour avoir une équipe paritaire” explique Clotilde Rousseau, Chief Revenue Officer.

  • Mettre en place un accompagnement spécifique pour chaque salarié·e au retour de son congé parental est également préconisé. Cette bonne pratique, c’est notamment Anne Le Bruchec, Chief People Officer chez JobTeaser qui nous l’a partagé : “Nous avons un processus qui compte plusieurs points de contact. Nous faisons notamment toujours un entretien RH avant et après le congé avec une trame que l’on met à disposition de la personne et que les deux parties signent, afin qu’elle nous signale par exemple un éventuel souhait de mobilité à son retour, ou une inquiétude particulière”.

Bonne pratique n°7 : Opter pour une grille de salaires

L’idée ? Fixer un cadre clair et inflexible pour éviter toute forme de discrimination sur le salaire et provoquer ainsi des progrès notables et immédiats en termes d’équité. Comme le dit Thibault Machet, le fondateur de PlayPlayune grille permet d’apporter plus d’équilibre, et de proposer un salaire juste même si un candidat demande moins”.

Concrètement, comment le faire ? 

  • Réfléchissez d’abord à comment être intransigeant·e en termes d’égalité salariale. “Chez Batch, nous mettons un point d’honneur à ne pas avoir d’écarts de salaire « inexplicables » pour le même niveau de séniorité. Cela paraît simple mais ce n’est pas évident : le “pay gap” est pire dans le monde des startups. Nous réévaluons proactivement certains salaires si besoin” témoigne Clotilde Rousseau, Chief Revenue Officer. Du côté de Jobteaser, Anne explique que la vigilance est de mise lors des revues de salaire : “en effet, c’est souvent un moment où on peut générer ou accroître les inégalités. Il faut donc y être attentif”.

  • Ensuite, vous pouvez également rendre votre grille de salaire publique. Selon Mathilde Callède de Shine, c’est notamment “ce qui a permis de supprimer les effets liés à la négociation (plus souvent menée par les hommes).” Tout est expliqué dans leur article sur le sujet.  

Bonne pratique n°8 : Instaurer du mentorat

L’idée ? Soutenir les femmes à haut potentiel par un système de mentorat voire de marrainage. En plus d’être un excellent outil pour développer leur réseau, le mentorat va encourager la transmission et le partage entre les femmes tout en leur apportant confiance en elles. Puisque c’est souvent par l’exemple que l’on peut se projeter.

Concrètement, comment le faire ? Vous pouvez commencer par développer des espaces de parole à l’intérieur de votre structure en prenant l’exemple de Contentsquare : “en 2022, nous avons lancé quatre premiers groupes de ressources des employés (Employee Resource Groups, ERG): Les ERGs sont conçus pour offrir des espaces communautaires aux employés pour se connecter, se soutenir mutuellement et défendre les sujets qui leur tiennent à cœur. L’ERG “Women at CS” a par exemple lancé une initiative appelée “cercles d’écoute” afin de permettre aux femmes travaillant chez Contentsquare de partager leurs expériences (et recommandations) pour les accompagner dans l’entreprise” relate le Chief People Officer.

Bonne pratique n°9 : Proposer des sessions de formations spécifiques pour les femmes

L’idée ? Permettre aux femmes de se former sur certains thèmes comme par exemple la capacité à négocier, à prendre la parole, la confiance en soi ou encore le sentiment de légitimité. En effet, on observe dans le monde du travail que les femmes ne manifestent pas toujours les mêmes forces que leurs collègues masculins. Pour se préparer aux réalités de certains postes, la formation représente une solution de choix pour compenser ces inégalités.

Concrètement, comment le faire ? Sur ce point, vous pouvez faire appel à une société externe.Nous faisons appel à une société de coaching. Les hommes sont souvent plus à l’aise lors des entretiens ou dans le cadre de négociations. Grâce à ce coup de pouce donné aux femmes, nous espérons faire bouger les lignes” explique Mathilde de Shine.

Bonne pratique n°10 : Embarquer l’interne

L’idée ? Embarquer très concrètement les collaborateurs motivés dans ce nouveau chapitre de l’entreprise pour que les actions soient les plus efficaces possibles. 

Concrètement comment le faire ?

  • Commencez par créer des groupes de travail sur le sujet. Par exemple, chez Skello, l’équipe en charge a invité “tous les collaborateurs de Skello qui le souhaitaient à participer à un brainstorming. Beaucoup d’idées ont germé et ont été soumises à l’équipe dirigeante. Il faut proposer à toutes les personnes, même à celles moins sensibles mais tout de même curieuses. Je n’aurais pas pensé seule à toutes les idées sorties lors des brainstormings” nous fait part Agathe Tavernier. Même stratégie chez Vestiaire Collective : “Nous avons créé un groupe de travail sur le Women Empowerment, sur la base du volontariat. Les salariés volontaires viennent de toutes les équipes et de tous les niveaux, et travaillent ensemble avec un budget prédéfini” raconte Dounia Wone. Si ces communautés sont bien pilotées et que les ressources mises à leur service sont adaptées, les résultats dépasseront sans aucun doute vos attentes. 

  • Ensuite, montrez l’exemple par le haut pour impulser une dynamique dans toute l’entreprise. “Durant nos réunions, nous faisons en sorte que ce ne soit pas que les managers qui présentent les chiffres du service” met en avant Christophe Dandois, CEO de Leocare. “Je demande parfois à intégrer une personne du sexe opposé quand il n’y a qu’un seul genre représenté dans une réunion. Demander à tout le monde de participer apporte de nouveaux regards, permet au leadership féminin de s’exprimer et donne plus à voir les différentes figures féminines de l’entreprise” rappelle Véra Kempf de Singulart. On ne pouvait pas mieux dire !

Pour télécharger le livre blanc complet « 12 entreprises tech face au défi de la parité. Regards croisés et bonnes pratiques » c’est juste ici.

Vous aussi, vous avez des conseils à partager pour favoriser la parité en entreprise ? Nous serions très curieux·ses d’en savoir plus. Vous pouvez nous adresser vos retours à l’adresse suivante : contact@wearesista.com.